Sur Google, la requête « confiance en soi » totalise exactement 64 millions de résultats en ce 9 décembre 2021. Cela en dit long sur ce que représente cette question pour l’humanité. Le manque de confiance en soi semble toucher tous les êtres humains, depuis le joueur de football qui lutte pour obtenir un Ballon d’Or au cadre du secteur bancaire, jusqu’au chômeur en recherche d’emploi et aux enfants de CP face à leurs tables de multiplication.
Mais voyons ce que nous propose le moteur de recherche : « 4 exercices pour renforcer la confiance en soi », « 10 trucs pour reprendre confiance en soi. », « Les clés de la confiance en soi. », ou encore « 15 habitudes pour améliorer sa confiance en soi. », « 5 techniques infaillibles pour retrouver confiance en soi. », et il y a ainsi des milliers de pages de truc et astuces en tous genres, tous parfaitement efficaces j’imagine.
Rêver
La croyance que nous devrions avoir confiance en nous crée inévitablement de la peur, un sentiment d’inadaptation plus ou moins intense suivant les sujets. « Le manque de confiance que je ressens m’empêche d’avoir la vie que je voudrais au niveau professionnel comme au niveau affectif. » « Ce manque de confiance en soi m’empêche d’oser m’exprimer, affirmer des points de vue », etc. Avec ce type de pensées, je peux vite avoir le sentiment que si j’avais confiance en moi, alors je deviendrais quelqu’un. Quelqu’un de mieux, quelqu’un de plus aimable, quelqu’un de plus brillant. Et voilà que je me prends à rêver…
La confiance s’acquiert…
Cette recherche sur Google démontre une chose ; nous avons collectivement tendance à penser que la confiance s’acquiert, qu’il s’agit de « quelque chose » qui nous manque, et que nous devons trouver ce quelque chose à l’extérieur de nous, l’apprendre et l’appliquer. Et lorsque nous aurons appliqué à la lettre ces techniques et que nous les aurons intégré, alors nous nous sentirons enfin bien, forts, tranquilles, apaisés, bref avec une belle confiance en nous-même.
Le manque de confiance en soi implique une faible estime de soi.
Avoir une faible estime de soi signifie que l’on juge sa propre personne. Le verbe estimer veut dire donner une valeur. En se donnant une valeur très faible par rapport à d’autres, on se juge donc comme inférieur. Courir après la confiance en soi implique de facto que vous souhaitez changer. Mais changer dans quel but ? Pour se comporter comme un autre que soi ? Pour avoir une réussite conforme aux attentes de la société et pouvoir vous « juger » positivement ? Quelle idée saugrenue ! Quelle trahison à soi-même que de vouloir devenir un autre que soi. Peut-on se rendre plus malheureux que ça ? Je ne le pense pas.
Un problème mal posé ?
Si je m’évertue à changer en intégrant des pensées ou des techniques extérieures à moi-même, je vais simplement m’éloigner de moi-même.
Je vais, l’air de rien, éviter de rencontrer mes peurs et mes angoisses, je vais simplement les contourner pour me comporter comme une machine bien huilée dans un monde où règne l’injonction de s’améliorer, l’efficacité, la performance, le dépassement de soi, l’adaptabilité… Et petit à petit, je vais immanquablement par me perdre de vue.
Que dit la science ?
La recherche scientifique montre que l’estime de soi n’apporte pas les promesses faites dans les livres et les stages de formation, coaching, etc. L’estime de soi intervient comme une conséquence possible d’une réussite, mais jamais comme la cause de comportements appropriés ou « gagnants ».
En 1990, l’État de Californie a financé le « California Task Force to promote self-esteem and social responsability » (250 000 $ par an) avec l’ambition d’accroitre l’estime de soi des écoliers. Ce fut un échec complet. “les résultats enregistrés de manière consistante démontrent que les associations entre l’estime de soi et ses conséquences attendues sont douteuses, insignifiantes, voire absentes.” (Mecca, Smelser, Vasconcello, 1989).
Ne fuyez pas
J’ai compris que je ne pouvais pas devenir différent, à moins de tuer quelque chose en moi, de nier ce qui se vit réellement en moi. Alors puisque je ne peux pas changer, j’ai choisi de dire oui, un énorme oui à la vie, c’est-à-dire à ce qui se présente, sans jamais rien rejeter, de faire confiance au courant de vie qui me traverse.
En faisant cela, je comprends que je me trouve toujours au bon endroit, au cœur de la seule réalité possible pour moi en ce moment. Je fais preuve de compassion envers moi. Moins je me mets en travers du chemin avec des questions sans fin et des jugements, plus je me sens libre et en accord avec la vie, plus j’ai de libertés d’action.
Aujourd’hui, je n’ai plus besoin d’avoir confiance en moi, parce que cette idée même de confiance en soi n’existe plus pour moi. Elle a perdu toute densité. J’ai simplement confiance en la vie, j’ai confiance en ce qui me porte. Je me sens en grande partie libéré de moi-même, libre de devoir me comporter d’une certaine manière, libre de changer d’avis, libre de me tromper, libre de me fâcher aussi et de commettre des erreurs.
Christophe LE BEC //